Quels États ont les gouvernements plus ouverts ? Évaluation des déterminants structurels de l'ouverture

Schnell, S. & S. Jo (2019). Which Countries Have More Open Governments? Assessing Structural Determinants of Openness. The American Review of Public Administration, Vol. 49(8), 944-956.

Contexte

Le gouvernement ouvert (open government), qui gagne de plus en plus en popularité, est présenté comme une nouvelle forme de gouvernance qui permet d'améliorer les performances gouvernementales et la participation citoyenne. Un tel engouement s’est traduit par un nombre croissant d’États ayant adopté des réformes de gouvernement ouvert. Sous l'impulsion de l'organisation Open Government Partnership, un effort mondial de développement d’initiatives gouvernementales a été réalisé. En pratique, le Partenariat pour un gouvernement ouvert (PGO) prend la forme d’un partenariat mondial et multipartite (78 États membres) qui vise à assurer les engagements concrets des gouvernements afin de promouvoir la transparence, de donner du pouvoir aux citoyens, de lutter contre la corruption et d’exploiter les nouvelles technologies pour renforcer la gouvernance. Cependant, il existe encore de grandes différences en termes d'ouverture entre les États membres du Partenariat. L’objectif de cette recherche est d’étudier les facteurs politiques, administratifs et civiques expliquant une telle variation. 

Définitions

Le Partenariat pour un gouvernement ouvert est un partenariat international multipartite à travers lequel les gouvernements s’engagent concrètement en faveur de la transparence, de l'autonomisation des citoyens, de la lutte contre la corruption et de l'utilisation des nouvelles technologies pour renforcer la gouvernance.

Résultats

La recherche fait le constat que deux facteurs structurels sont les plus forts prédicteurs du niveau d'ouverture : le contrôle de l'exécutif et des agences publiques ainsi que le niveau d'éducation des citoyens. Globalement, les caractéristiques politiques et civiques d'un État comptent autant, voire plus, pour l'ouverture du gouvernement que l’organisation bureaucratique et les traditions administratives. Le niveau d'éducation des citoyens est également le prédicteur le plus solide et le plus cohérent de l'ouverture gouvernementale et ce, quelles que soient les mesures utilisées. Le tableau ci-dessous résume les tests d’hypothèses réalisés dans la recherche.

Facteurs politiques

Hypothèse 1 (non corroborée) :

  • La concurrence politique à court terme (d'une année à l'autre) n'influence pas l'ouverture des gouvernements.

Hypothèse 2 (corroborée) :

  • Un contrôle plus fort des agences publiques et de l’exécutif est associé à une plus grande ouverture et ce, pour tous les aspects de l'ouverture mesurés.

Facteurs administratifs

Hypothèse 3 (non corroborée) :

  • La common law et les traditions administratives anglo-saxonnes ne sont pas associées de façon significative à l'ouverture.

Hypothèse 4 (non corroborée) :

  • La qualité bureaucratique n’a pas d’effet sur l’ouverture des gouvernements.

Facteurs civils

Hypothèse 5 (corroborée) :

  • Le niveau d'éducation est associé significativement et positivement aux mesures d'ouverture.

Hypothèses 6-7 (partiellement corroborée) :

  • Le nombre des organisations issues de la société civile est important pour la transparence budgétaire et les libertés civiles ;
  • La liberté de la presse est importante pour l'accès à l'information et les libertés civiles.
Messages clés pour la politique et la pratique

Les chercheurs ont constaté que les États ayant un contrôle plus fort des agences publiques et de l’exécutif ainsi qu’un haut niveau d'éducation citoyenne ont des gouvernements plus ouverts. Si un nombre élevé d’organisations issues de la société civile est associé à une plus grande transparence budgétaire et à des libertés civiles plus élevées, l'accès à l'information ou aux lois sur la divulgation des actifs n’a, pour sa part, pas d’effet.

Deux facteurs structurels constituent les leviers les plus forts pour assurer une transparence et une participation des citoyens : (1) le contrôle des organisations publiques et des organes exécutifs par le pouvoir législatif, (2) le niveau d'éducation des citoyens.

Les résultats suggèrent que des études futures devraient inclure l’éducation citoyenne en tant que variable explicative dans les modèles théoriques. Par ailleurs, il existe des exemples et des suggestions de la part des milieux universitaires et des praticiens sur la façon de recueillir de telles données (p. ex., en demandant aux États de recueillir des données relatives à la rapidité et l'exactitude des réponses des organisations publiques quant aux demandes d'information des citoyens).

Méthode et limites de la recherche

La collecte des données a débuté par l’identification des critères d’inclusion des cas. Quatre critères d’admissibilité (la transparence budgétaire, l’accès à l’information, la divulgation des actifs et libertés civiles) ont été définis. Les données publiées sur le site de l'OGP-IRM6 ont servi à construire une base de données pour 121 États pour lesquels les données sont disponibles entre 2011, année où le PGO a commencé, et 2015.

Les données ont fait l’objet d’une analyse statistique. Pour chaque État, une note globale d’admissibilité a été calculée (variables dépendantes). Par la suite, un test des hypothèses (régressions par moindres carrés ordinaires (MCO)) a été réalisé.

En raison des défis méthodologiques et des coûts élevés, l'absence de données transnationales fiables quant au respect des dispositions en matière de transparence (p.ex., l'accès à l'information et les obligations d'information sur les actifs) limite la portée de la recherche et de ses conclusions.

Financement de la recherche

Les auteurs n’ont reçu aucun support financier pour leur recherche.