Favoriser l'inclusion numérique : enseignements du Royaume-Uni

Al-Muwil, A., Vishanth, W., El-haddadeh, R., Dwivedi, Y. (2019). Balancing Digital-By-Default with Inclusion: A Study of the Factors Influencing E-Inclusion in the UK. Information Systems Frontiers, 21, pp. 636-59.

Contexte

Les taux d’utilisation des services gouvernementaux en ligne varient au sein de la population britannique. Plusieurs mesures visant à accroitre l'inclusion des citoyens dans l'utilisation de ces services ont été identifiées. Cette recherche a pour objectif de recenser les facteurs clés de l'inclusion numérique (e-Inclusion) qui influencent l'utilisation des services gouvernementaux en ligne par les citoyens. Cette étude combine la théorie décomposée du comportement planifié (the Decomposed Theory of Planned Behaviour) avec la théorie de l'utilisation et de la gratification (the Use and Gratifications Theory) et mène une enquête auprès de 510 internautes. Le modèle proposé d'e-inclusion fournit un cadre de référence pour étudier l'acceptation et l'utilisation des services gouvernementaux en ligne et ce, dans un contexte national où presque toutes les transactions gouvernementales sont, par défaut, numériques.

Définition

L'inclusion numérique  (e-Inclusion) réfère à la connexion de chaque citoyen, chaque école et chaque entreprise et est définie au sens large comme l'impact social relatif aux différentes utilisations des technologies de l’information et de la communication (TIC) entre les divers groupes socio-économiques et les individus. Ainsi, pour que l’administration en ligne soit inclusive, elle doit toucher l’ensemble des segments de la population et ce, avec des services en ligne qui répondent aux besoins des personnes défavorisées sur le plan numérique.

Par ailleurs, les chercheurs distinguent l’e-inclusion de l’e-adoption. Alors que l'inclusion numérique s'intéresse principalement à l’impact social de l’utilisation des TIC par le gouvernement, l’adoption numérique, se concentre sur les taux d'utilisation des TIC et de leurs impacts économiques.

Résultats

L'échantillon, au sein duquel les données ont été collectées, se compose d'internautes. Parmi les 510 personnes interrogées, 40 % des répondants appartiennent au groupe d'âge des 25-44 ans et le reste du groupe a plus de 44 ans. 40 % des répondants sont des employés à plein temps, 17 % à temps partiel, 19 % sont à la retraite, 20 % sont sans emploi et 4 % sont étudiants. Au sein de l’échantillon, 70 % des utilisateurs ont déjà eu recours aux services gouvernementaux en ligne.

Les facteurs explicatifs de la non-utilisation des services gouvernementaux en ligne sont les suivants :

  • Les deux principaux facteurs sont le souci de sécurité et le manque de compétences.
  • Environ un citoyen sur cinq qui utilise internet, ne s’en sert pas pour les services gouvernementaux en ligne. Par conséquent, une partie de la population, qui possède donc les compétences pour effectuer des transactions complexes, n’a pas de problèmes de confiance avec internet. Une piste d’explication pourrait être la préférence générale pour le contact personnel ou le manque de connaissances sur les informations et les services disponibles en ligne.
  • Si la confiance en l'internet comme média n'est pas problématique, c’est davantage le manque de confiance envers les services gouvernementaux en ligne qui est la source du problème.
  • Le coût et le manque d’accès sont les autres facteurs de la non-utilisation des services gouvernementaux en ligne.

Une connaissance préalable des services gouvernementaux en ligne constitue un facteur augmentant le taux d’utilisation. Cependant, près de trois utilisateurs sur quatre ne connaissent pas les services fournis par le gouvernement et les avantages qu'ils retirent de l'utilisation de ces services.

Le taux d’utilisation des répondants varie selon le type d’activité : les services gouvernementaux en ligne en matière de transaction (49 %), les services gouvernementaux en ligne relatifs à l’information (75%), les services bancaires en ligne (87%), le commerce en ligne (86%) et l’utilisation d’internet (100%).

Messages clés pour la politique et la pratique

Les autorités doivent prendre en considération la complexité du phénomène et envisager l’inclusion numérique au-delà des questions d'accès aux technologies. En ce sens, l’identification des principales motivations des adoptants et des non-adoptants est cruciale. En outre, les autorités doivent concevoir des interventions politiques afin de combler les lacunes préalablement identifiées.

L’adoption par défaut des TIC au sein de l’administration peut induire un risque d’exclusion numérique d’une partie de la population. À cet égard, les aspects de l'inclusion vont au-delà de la question des enjeux techniques et des compétences nécessaires des utilisateurs mais doivent également être intégrés dans les politiques numériques.

L’identification des facteurs réduisant l'utilisation des services gouvernementaux en ligne (le manque de confiance envers les services gouvernementaux en ligne, le souci de sécurité, le manque de compétences, le coût, la préférence pour le contact personnel ou encore le manque d’accès) contribue à améliorer la compréhension des mécanismes influençant l'inclusion numérique. L’examen de ces facteurs a également permis de mettre en évidence un décalage dans les taux d’utilisation des applications en ligne qui, pourtant, exige des qualifications similaires (p.ex., 87 % des individus de l’échantillon ont déjà utilisé des services bancaires en ligne, contre 49 % qui ont eu recours aux services gouvernementaux en ligne afin de réaliser des transactions).

Méthode et limites de la recherche

La collecte des données repose sur un sondage. L’échantillon a été constitué de citoyens britanniques. L'enquête était volontaire et seuls les répondants intéressés étaient invités à y participer. L’échantillon est donc non probabiliste. Les chercheurs ont distribué physiquement le questionnaire aux participants dans différents endroits publics. En tout, 510 questionnaires ont été jugés utilisables sur les 800 questionnaires distribués.

Pour tester les hypothèses, une analyse quantitative a été conduite. Lors de la collecte des opinions des répondants, une échelle de Likert a été utilisée pour calibrer les différentes propositions de réponses aux questions. La modélisation par équation structurelle a été utilisée pour l'analyse des données.

Une limite est identifiée par les chercheurs concernant la collecte des données qui aurait pu se faire dans des lieux géographiques plus diversifiés afin de rendre le résultat de la recherche réellement généralisable. 

Financement de la recherche

Il n’y a pas d’information concernant le financement dans l’article.