Comment la technologie des villes intelligentes crée-t-elle un citoyen transactionnel?

Johnson, P. A., Robinson, P. J., Philpot, S. (2020). Type, tweet, tap, and pass: How smart city technology is creating a transactional citizen. Government Information Quarterly, 37.

Contexte

Dans le cadre de la promotion des programmes de villes intelligentes (Smart Cities), l'accent est mis sur la simplification des échanges entre les citoyens et le gouvernement. Bien que, traditionnellement, il y avait toujours eu des échanges entre le gouvernement et le citoyen, l'essor des téléphones intelligents et des technologies de ville intelligente ont permis des micro-échanges entre les citoyens, les gouvernements et les courtiers en information. L’équipe de recherche a conceptualisé comment la ville intelligente incorpore le citoyen au moyen d’une série de micro-échanges encodés en temps réel. Concrètement, l’équipe de recherche a développé quatre grands modes d’échange: traditionnel (type), tweet, clavardage (tap) et déplacement (pass). Ces quatre modes sont utilisés pour formuler des réflexions sur la façon dont les citoyens interagissent avec le gouvernement à l'ère de la ville intelligente, et comment ces interactions impactent la relation entre le citoyen et le gouvernement.

Définition

La notion centrale est celle du citoyen transactionnel. Cette notion permet d’explorer comment la ville intelligente intègre de plus en plus le citoyen. Ce citoyen transactionnel est enregistré par les capteurs de la ville intelligente et intégré au processus décisionnel grâce à l'utilisation de certaines plateformes privilégiées. Ces plates-formes peuvent inclure les médias sociaux, des plates-formes d'engagement spécifiques au gouvernement et l'utilisation d'infrastructures urbaines dotées de capteurs (p.ex., les compteurs de pistes cyclables, ou les bancs de parc avec capteurs).

Résultats
  • Quatre modes d’échange entre le citoyen et la ville intelligente sont proposés :
    • L’échange « traditionnel » regroupe les formes de transaction classiques (p. ex., un courriel, un appel téléphonique, une lettre ou tout autre type de canal de communication standard adressé ou envoyé directement à un bureau, un employé ou un élu du gouvernement).
    • Les échanges qui sont médiatisés par une tierce partie font partie du mode « tweet ». Le terme « tweet » désigne toute utilisation de médias sociaux tiers.
    • Les échanges effectués par l’utilisateur, dans le cadre d'un processus déclenché par le gouvernement, sont considérés sous le terme de « clavardage ». Le terme désigne une action qui doit atteindre un objectif spécifiquement construit. Ce mode fait référence à une contribution demandée aux citoyens par le gouvernement, comme la participation à un forum de planification civique.
    • Le mode « déplacement » est un échange entre le citoyen et le gouvernement qui n'est pas effectué par une interaction directe. En pratique, il s’agit de réaliser des actions telles que se déplacer dans un espace instrumenté. La technologie des villes intelligentes (p.ex., les caméras vidéo aux intersections ou les capteurs de mouvement) peut capter les actions des citoyens.
  • En positionnant le gouvernement comme une plateforme sur laquelle des entreprises du secteur privé telles que Facebook, Apple, Google et Amazon peuvent se brancher et innover, il s'ensuit une institutionnalisation des rôles du secteur privé dans l'administration locale et les processus démocratiques.
  • Le lancement en 2018 de la Coalition for Digital Rights est un exemple récent de la manière dont l’autorité locale régit et protège les droits de l'Homme et le gouvernement ouvert via une plateforme de ville intelligente.
  • Dans la ville intelligente, il existe un risque que les actes de « citoyenneté » soient réduits à la capacité d'une personne à générer des données. Cette dérive contraste fortement avec les idées traditionnelles de participation démocratique et de citoyenneté locale. Si la participation citoyenne se résume à faire des citoyens des sources de données, l'interaction entre le citoyen et le gouvernement diminue.
  • Alors que l'utilisation des nouvelles technologies peut rendre les transactions plus transparentes, l'introduction d'algorithmes tend plutôt à en augmenter l'opacité.
Messages clés pour la politique et la pratique
  • La typologie (type, tweet, tap and pass) proposée fournit un outil conceptuel pour aider les villes à réfléchir sur la façon dont les nouvelles technologies peuvent constituer des canaux de communication alternatifs entre eux et les citoyens.
  • Cette typologie rappelle que l'adoption d'une nouvelle technologie ne signifie pas systématiquement que de nouvelles relations entre les citoyens et le gouvernement se forment.
  • Avec les différents flux de données entrants de la ville intelligente, il est impératif pour le gouvernement d'adopter une approche plus nuancée, en considérant de manière critique les différents types de données et les obligations associées à l'utilisation d'un type de données.
  • En dépit des affirmations selon lesquelles les villes intelligentes sont plus inclusives, le déploiement de la technologie peut avoir l'effet inverse. L'inclusion n'est pas un résultat naturel de l'adoption d'une technologie élargie.
  • Si la technologie accélère la transition des relations entre le gouvernement et les citoyens, il est tentant d'utiliser les taux de participation par la contribution de données comme mesure du soutien des citoyens, plutôt que de se concentrer sur des indicateurs axés sur des activités plus interactives entre les citoyens et le gouvernement.
Méthode et limites de la recherche
  • Il s’agit d’une publication conceptuelle.
  • Aucune méthode n’a été établie dans la publication.
  • La publication définit quatre modes de transaction relatifs à la façon dont les citoyens interagissent avec le gouvernement dans le contexte émergent des villes intelligentes. L’équipe de recherche aborde ensuite deux domaines principaux dans lesquels les formes transactionnelles de participation des citoyens peuvent avoir un impact sur les relations entre les citoyens et le gouvernement : les processus d'inclusion/exclusion et la définition de la citoyenneté.
  • Il n’y a pas de limite de la recherche mentionnée dans l’article.
Financement de la recherche

Le financement de cet article a été assuré par le programme de subventions de développement Savoir du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada.